THIS IS NOT A LOVE SONG : JOUR 1


«Ca y eeeeeeeeeeeeeeest !» avait-on envie de crier comme des adolescentes fraîchement
baptisées quand nous sommes arrivées devant Paloma hier, mercredi 22 mai, jour de
lancement du festival. Devant Paloma, la rampe a vite attiré les skateurs d'ici et d'ailleurs : canap' et fauteils sont installés pour se sentir comme chez soi, dans le confort d'un lieu comme une invitation à la passion, qu'il s'agisse de musique ou de glisser sur la planche. Ça crache du gros son en échangeant figures et anecdotes tandis que l'on se prépare à rentrer pour notre première interview et c'est dès ce moment que l'on comprend que Paloma et Come On People ont réussi à allier skate et musique sur ce festival : l'on sent que les deux domaines, souvent connectés, vont interagir, se compléter et s'enrichir, tisser des liens et rendre notre expérience du festival plus inoubliable encore.
Malgré l'annulation de PEACE, coincés à Tours avec un tour bus en panne, le public arrive et s'échauffe dans le patio – véritable havre de paix, de bière et de potes – avant les premiers concerts. Si l'on aura pas pu se délecter de la prestation de la relève rock à la sauce british PEACE – qui nous fait un peu sortir du trip Musique = Californie - , bien d'autres surprises et satisfactions nous attendaient.

EGYPTIAN HIP HOP



Pour ouvrir le festival, la grande salle se remplit et accueille Egyptian Hip Hop, des british avec un certain goût du psychédélisme façon moderne, tout en teintes colorées et vives, qui percutent et apaisent à la fois. Leur univers fait planer une ambiance jeune et décalée qui convient parfaitement au festival. Ce soucis de l 'indé qui caractérise TINALS se retrouve chez eux tant par leur performance ultra vivante qui nous déplace à mille lieux du mainstream, là où il fait bon vivre la musique que par leur attitude détendue. Ce degré élevé d'insouciance se partage entre le groupe et le public, particulièrement au moment où le chanteur descend dans la fosse, nous initiant au mieux à l'esprit d'indépendance et de flirt avec la vitalité brute et le psyché frontal.

CONNAN MOCKASIN



Après une mise en bouche lors de l'interview, on ne cache pas notre attente de voir à l'oeuvre ce personnage si étrange qu'est Connan Mockasin. Et l'on est pas déçues : un ange arrive sur scène, l'on sent son aura qui fait briller ses cheveux comme des fils d'or. Et pour ne rien gâcher à cette arrivée, comme pour nous mettre à l'aise, le peignoir semble être la tenue de rigueur (si on avait su...). Enfin les premiers accords, comme un énorme tsunami, ça vous soulève les tripes tout doucement et vous emmène très très loin. Un voyage extraordinaire commence et ça vaut bien un tour du monde! Une fois le public envoûté, Connan sait qu'il fait bien ce qu'il veut de nous, il nous fait nous asseoir, nous relever à sa guise comme un prince, nous faisant participer à ce manège qui semble plaire à tout le monde. C’était nonchalant, une ballade en barque avec Lewis Caroll, un coucher de soleil sur la plus belle plage du monde, un après-midi dans un champs de coquelicots...un live de Connan Mockasin à Paloma. Mais toute bonne chose à une fin, et comme il ne faut pas abuser de ce qui est trop bon on se contentera d'un set de 45min qu'on aurait aimé rembobiner, comme un bon film que vous auriez aimé ne jamais avoir vu pour pouvoir le redécouvrir encore et encore. On sort de la salle un peu ivres d'amour, prendre un peu de répit parce qu'on sait bien que la soirée est loin d'être finie.

SAVAGES



Après la douceur toute particulière de Connan Mockasin, on passe au côté rock de la force dans le Club avec les londoniennes de SAVAGES, girls band à qui l'expression « du tonnerre » va comme un gant. Chacune des musiciennes semble parfaitement dans son élément et maître de son jeu quand elles nous crachent leur son qui sent plus le mal que le mâle. L'affaire est différente du côté de la chanteuse, Jehn (de John & Jehn, comme on aurait pu s'en douter), qui prend tout à coup des postures masculines. Habitués à la douceur de John & Jehn et à ce que les éclairs de sa voix soient seulement marqués par un coup de talon au sol ou un bras tendu vers le public, ce jeu de scène est un peu surprenant. Elle gesticule comme un homme en appuyant un peu trop à notre goût sur les variations de voix ce qui rend la chose quelque peu déstabilisante. Mais l'on si fait peu à peu et l'on en vient vite à se laisser transporter dans le tourbillon de leur prestation jouissive et particulièrement bien menée du point de vue instrumental mais aussi des paroles toujours à-propos. Le message passe coûte que coûte et l'on se laisse envoûter par leurs idées, leur musique comme un «manifeste», une invitation à vivre les choses autrement, de manière ô combien plus pénétrante, à l'image des sons qu'elles font sortir de leurs instruments torturés. L'on retiendra avec sourire la prestation de John, ayant participé à l'enregistrement de l'album, qui vient remettre une couche hard sur les intonations démentes de SAVAGES. Mention très bien pour la batteuse : redoutable de vivacité, elle laisse échapper tous ses démons quand elle donne le rythme en remuant tout son petit corps prêt à exploser, à se laisser aller à ce côté pur d'un rock comme un retour aux sources, qui voit la beauté du prosaïsme sans en faire des tonnes. Droit au but, voilà comment les SAVAGES semblent procéder dans leurs compositions.

DEATH GRIPS



Death Grips est une bête sauvage qui se jette sur toi pour te mettre en pièce, tu ne la vois pas arriver,et quand elle repart c'est déjà trop tard. Elle ne te laisse aucun répit, mais en réalité, tu as adoré ça !
Ce n'est pas la mort qui s'accroche mais tes tripes à ta carcasse, luttant pour ne pas sortir
de ton antre sans dire au revoir, propulsées par l'énergie débordante du chanteur -
monstrueux dans sa splendeur - et ses crachats de haine trop longtemps réprimée, restée
terrée alors qu'elle ne demandait qu'à sortir en musique, en cris et en mots à peine
perceptibles nous invitant à plaquer sur eux nos propres idées, frustrations ou révoltes. Le résultat est bouillonnant, prenant et l'on s'accroche jusqu'au bout tant que cette
admiration, cette entrée en Death Grips est une bête sauvage qui se jette sur toi pour te mettre en pièce, tu ne la vois pas arriver, et quand elle repart c'est déjà trop tard. Elle ne te laisse aucun répit, mais en réalité, tu as adoré ça !
profondeur dans leur univers se fait quelque peu terrifiante.

L'on sort de là retournés, les jambes tremblantes et la tête transformée en ghetto. Tout
fuse et l'envie de cogner et de sauter partout n'en démord pas. Mais Paloma a tout prévu
et l'ambiance relaxante du hall et du patio pour ramènent à la réalité d'un festival qu'il fait
bon vivre entre potes, tout sourire, bière à la main et clope au bec. Alors plutôt que se jeter sur le premier venu pour lui retourner la claque du siècle, on va plutôt se faire tirer le portrait dans la photocabine histoire d'immortaliser les moments d'intensité qui viennent de s'ancrer en nous.

ANIMAL COLLECTIVE



L'effet catharsis produit par Death Grips est efficace : après avoir évacué toute notre haine via nos muscles en tension, l'on est fin prêts pour un retour à l'ambiance planante et décousue avec Animal Collective. L'on passe de la posture d'ado tapageur à celle de l'enfant émerveillé quand on découvre le décor d'Animal Collective, à peine remis du set précédent. L'effet est immédiat : l'on a envie de voir comment leurs sons, leurs voix et leurs tripes se projettent sur ce décor, l'animent et nous le rendent comme un rêve devenu réalité.

Le groupe tant attendu commence à jouer, on sent la tension monter parmi les fans, l'incertitude et la curiosité chez les autres. Animal Collective laisse parfois des impressions mitigées, on adore ou on reste perplexe. Alors qu'ils installent une ambiance psychique spectaculaire, on ne peut détacher nos yeux de ces gigantesques dents où une flopée d'images projetées nous allument des lumières dans le cerveau. Le morceau commence, le « Geologist » avec sa lampe frontale se détache sur fond d'explosions et d'animations épileptiques, tandis que le chanteur nous fait commencer le voyage. Puis le batteur et le bassiste le suivent en canon. Ce dernier, en combinaison immaculée, finira par danser au milieu de la scène, jusqu'à l'apogée finale de la soirée.


Une première soirée passée dans la fraternité nous aura donné un avant-goût formidable. On se sent à la maison, entourés de personnes prêtes à échanger et transformer ces quatre jours en une expérience inoubliable. Comme Connan Mockasin qui vient danser pendant le set de ses copains d'Egyptian Hip Hop, le copinage et la fraternité nous a mis le sourire aux lèvres pour les trois prochains jours au moins.
On y retourne de ce pas pour Merchandise, The Intelligence, Melody's Echo Chamber, les copains de Valencia Motel mais aussi JC Satan, Nick Waterhouse, Guards ou encore BRNS ou King Tuff. Sans oublier Amon Tobin qui clôture la soirée avec son live Two Fingers.


Jessyka, Lisa et Alice S.